Bienvenue au village des fous
Chaque jour, mes anciens camarades de Stalag, appelé désormais plus communément sur ce site, mon précédent précédent Jolitravail, me font part d'anecdotes croustillantes sur leur jolie petite entreprise, dont l'état de putréfaction est très très avancé.
Des vols répétés de tickets restau, remboursés sur le champ, lorsque les victimes sont sur la liste des amis du chef des gommes. Des vols d'ailleurs répétés de tout, les cambrioleurs de la dernière fois ayant sûrement eu la bonne idée de faire des doubles de toutes les clés, que le chef des gommes range très consciencieusement dans une gracieuse armoirette à clé, chacune d'elle portant la mention de la serrure correspondante.
Un chef des gommes qui fait sa semaine en 4 jours, en arrivant à 10h, et repartant à 17h, avec 3 heures de pause déjeuner...et qui passe probablement une partie de son précieux temps de travail condensé, à se palucher sur un site de rencontres, avec pour pseudo "Fin gourmet" d'une part, et à lire les mails du reste du personnel, enfin, au moins de ceux qui sont soupçonnés de traîtrise, d'autre part.
Un ami du chef des gommes, un commensale proche de la clochardisation, qui est actuellement payé à faire des mots fléchés (sûrement les mêmes que ceux de la très grosse comptable raciste, antisémite et homophobe). C'est ce même individu qui est à l'origine du fichier magique de cette jolie petite structure, lequel fichier devait permettre, je le rappelle, de faire des mailings ciblés en fonction par exemple, de la taille du sexe des individus masculins (les Mr.), et de la date des dernières règles des individus féminins (les Mme.).
Des sanitaires totalement défectueux, obligeant le personnel à aller faire pipi ou popo dans des chiottes sur un palier situé à l'étage en dessous. Ces mêmes sanitaires topkapiens faisaient pourtant, il n'y a pas si longtemps de cela, la fierté de l'équipe dirigeante (enfin, dirigeante, le mot est un peu fort)
Des réunions de travail pour déterminer qui ira porter le courrier à la poste, pendant que celui qui s'en charge habituellement n'est pas là : on est à deux doigts de prendre un prestataire extérieur pour venir chercher le courrier, et l'apporter au bureau de poste, qui se trouve à 100 mètres. L'avantage de l'externalisation est qu'il faudra rédiger un cahier des charges pour définir une procédure, lancer un appel d'offres, en toute transparence, puis choisir avec objectivité un prestataire extérieur (un copain, payé très très cher).
La pauvre fille qui me remplace est aussi vive qu'une fine de claire : une pauvre gourdasse, perdue dans cet univers impitoyable de la petite structure d'envergure nationale (déliquescente). Un lapin affolé dans les phares d'une voiture, qui n'ose pas demander à Mme Labenne ce qui s'est dit dans une rencontre au sommet avec un obscur conseiller technique : "Ca se fait, tu crois vraiment que je peux lui demander ?" demanda-t-elle au PaCa. "Ben oui, c'est même assez normal", lui répondit-il. Il mourait d'envie de lui dire, à l'instar de Renée Saint-Cyr dans Palace : on ne dit pas : "dites moi, la vieille pète-couilles, vous m'filerez fissa le compte-rendu de la réunion de merde à laquelle vous êtes allée, hier !". Non, on demande poliment : "Madame, pourrai-je, s'il-vous plaît, avoir un debriefing de votre réunion d'hier ?".
Une fort bonne ambiance règne donc, à laquelle, je ne suis apparemment pas étrangère, puisque mon nom circule encore dans les couloirs de cette merveilleuse petite entreprise : je suis en effet à l'origine d'un complot estival, qui a consisté à "organiser", en plein mois d'août une petite partie de Pictionnary pendant la pause déjeuner. Ce forfait que nous commettions tous les ans à l'occasion de notre fameuse journée buffet campagnard et tongs, a été révélé au grand jour par l'immonde chef des gommes. Et il a donné lieu à la réflexion suivante, de la part de cette chère Mme Labenne, qui, plus que jamais, s'implique quotidiennement dans la vie de son entreprise et fait preuve d'une vraie vision stratégique : "Si je l'avais su, ces personnes auraient fait l'objet d'un blâme".
S'il en avait parlé plus tôt, j'aurais donc reçu le mail suivant :
De : Mme Labenne
A : Lydia M.
Importance : haute
Madame,
Vous avez récemment organisé un jeu sur votre lieu de travail.
Je vous rappelle que la position de cadre que vous occupez dans cette entreprise vous oblige à adopter un comportement empreint d'exemplarité. Il n'est donc pas concevable qu'un responsable de service utilise son temps de travail, fut-ce pendant la pause déjeuner, pour se livrer à des activités non directement liées à sa mission.
En conséquence de quoi, je vous informe que j'engage dès ce jour une action disciplinaire à votre encontre, en vertu des articles du Code du travail relatifs aux sanctions disciplinaires.
Vous recevrez donc prochainement par courrier recommandé une convocation pour un entretien disciplinaire, blablabliblablabla...
Mme Labenne
Directrice générale de Lejolitravail
Mon seul regret concernant cette vénérable petite entreprise est donc de n'avoir pas reçu ce mail, dont la bêtise aurait largement égalé celui sur les consignes concernant l'usage des cabinets, qu'il nous fallait laisser aussi propres en sortant qu'en entrant.
Ce n'est tout de même pas donné à tout le monde d'avoir un patron aussi intelligent, et des collègues aussi sympas.
Alors, c'est là, le Jolitravail ?